vendredi 4 octobre 2013

Ah Vénus , oui...

Voici récemment qu’un ami auteur de théâtre vient me voir et me demande de lui créer un masque de la vénus de Botticelli . heureux que l’on pense à moi pour la création d’un masque je saute de joie mais assez rapidement je me rend compte que l’affaire n’est pas si simple. Tout d’abord je constate en comparant cote à cote plusieurs reproductions du même tableau que l’émotion qui émane du visage de la vénus n’est pas du tout la même. En fonction de la prise de vue, l’ intensité de la lumière et le contraste transforme  radicalement l’émotion qui s’en dégage. Je suis frappé de ce que le dessin étant rigoureusement le même je ne retrouve pas  du tout la même sensation simplement parce que la lumière a changé. Ce sentiment est si fort que j’ai l’impression de deux personnalités différentes l’une douce et avenante me regarde, l’autre fermée et hautaine  regarde l'infini, perdue dans le lointain.
Comment dés lors transformer en volume le portrait d’une peinture, d’une image, d'une photo. Non seulement il s’agit d’une transposition qui demande de créer des espaces qui n’existent pas ( puisqu’un tableau n’a, par définition, qu’une face) mais de plus je ne maitrise pas la lumière qui tombera sur le masque.
Sans oublier que le passage de deux à trois dimensions  transforme la perception du spectateur. Un tableau s’adresse à l’imagination abstraite  de l’observateur qui doit réinventer une réalité qui n’est que partiellement montrée tandis que le volume s’adresse à l’émotion suscitée par une sensation palpable que l’on peut voir dans sa totalité.
Ainsi, si vous voulez transposer un visage à deux dimensions en volume méfiez vous, la ressemblance risque fort de ne jamais satisfaire votre commanditaire.


mardi 2 juillet 2013

Les masques pour qui ?

Les masques pour qui pourquoi ?


A l’origine de l’humanité aussi loin que les hommes puisent dans leur histoire le masque est présent dans les mythes fondateurs. C’est un instrument incontournable de la formation des civilisations. Il sert tout d’abord à souder le clan, créer les appartenances à une société donnée puis avec le temps et l’évolution le masque participe à tous les instants important de la vie des hommes.




Le masque est  en rapport avec les dieux, à la fois pont et  lien entre le mystère  insondable et la nature tangible. Il préside à tous les passages : d’initiation, de guérison, de naissance et de mort. Il est la mémoire de la société et en assure la transmission en attendant l’écriture.
Plus tard dans le théâtre antique il est  l’instrument privilégié du lieu social où se joue les problèmes de la société devant les citoyens. Les incite à réfléchir et agir en conséquence. Même s’il n’est plus le dieu vivant sa puissance de fascination reste toujours supérieure à celle d’un acteur humain.
Dans le carnaval médiéval le masque est encore le roi, et s’il n’est plus le mythe, il n’est pas non plus en représentation ; il participe du mythe car le carnaval est un rituel et aussi du théâtre, bien qu’il ne soit pas fait pour les spectateurs car il est un spectacle pour ceux qui n’ont pas la chance d’y prendre part. Le masque de carnaval est avant tout important pour celui qui le porte, il lui assure une impunité relative qui lui permet de transgresser l’interdit et ainsi de renaitre.

Aujourd’hui où sont les masques ?

Les cérémonies primitives encore vivantes en Afrique et en Asie, il y a peu, ne sont plus que des  souvenirs, sujets d’études passionnant pour les anthropologues. Les théâtres de masques classiques grecs et romains ont disparus, le Noh japonais et les théâtres du sud-est asiatique ne sont plus que des pièces de collections, inestimables certes, mais sans contact réel avec la vie d’aujourd’hui.
Alors où est le théâtre de masque du XXIème siècle ?
Dans les années 60 du siècle dernier, le Bread and Puppets avait donné un bel exemple de la force des masques et d’autres metteurs en scène ont essayé de jouer masqué, peu ont su créer une forme de théâtre dont le masque serait de nouveau ce lien privilégié entre le mystère et notre vie de tous les jours.
Pourquoi le masque fait-il aussi peur aux créateurs ?
Affaire à suivre...



Les images illustrant ce message sont tirées du Carnaval de Viviers pour lequel j'ai oeuvré pendant des années. La tête mythique de 3m de haut à été imaginé par des enfants à qui on avaient demandé de dessiner un monstre représentant l'avidité consumériste qui pollue la rivière. Je l'ai réalisé d'après leurs indications. Il a été promené dans les rues de la ville ; dans son ventre une bande son déversait des borborygmes étonnant En fin de carnaval il a été brulé sur le Rhône en grande cérémonie. Les dragons représentaient le peuple (le fleuve, la vie...) qui chassent le monstre.

vendredi 29 mars 2013

AH -NIMAL...


Mon dernier stage de février en Ardèche portait sur le travail du masque animal.
Pourquoi ramper comme un serpent, sauter comme un cabri ou faire le gros dos comme un chat , caqueter comme une poule?


Nous avons passé l’âge de ces jeux enfantins !
Eh bien non, il y a beaucoup d’avantage à jouer les animaux.
Tout d’abord il libère le corps de l’acteur, le délie et lui donne l’opportunité de se comporter d’une autre manière que les convenances et lui redonne sa liberté d’action. Ainsi la souplesse se développe et la gestuelle trouve de nouveau champs d’exploration.
Mais ce n’est pas tout, indépendamment du fait que l’acteur explore de nouvelles manières de bouger, il peut également se soustraire à la prison de ses sentiments.
L’expression de ceux ci est directement liée au corps, chaque émotion provoque une attitude corporelle particulière souvent infime mais très précise.
Or au théâtre nous avons à exprimer des émotions que nous ne ressentons pas forcément, voire que nous n’avons jamais ressenties. Si l’acteur n’a pas fait le travail d’observation très pointu qui consiste à décortiquer la traduction corporelle de chaque émotion, il va très souvent se perdre dans des attitudes stéréotypées.
L’animal nous offre alors la distance nécessaire pour observer le mouvement de l’émotion, sans l’affect personnel. Le masque est alors d’une aide précieuse  pour trouver la nature propre du chat, de l’oiseau...
Ainsi ce jeune homme qui n’arrivait pas à jouer la puissance supérieure d’un roi, a immédiatement trouvé l’attitude juste en pratiquant le masque du lion.
Le règne animal est infini dans sa gestuelle et dans ses comportements voilà donc un champ d’exploration qui peut durer longtemps.

lundi 4 mars 2013

Stage à L'UCCA


Nouvelles expériences Chinoises


Après plus d’un an d’absence voilà  quelques informations sur mes activités masquées. L’an dernier j'ai passé plusieurs mois en Chine, pour travailler avec un metteur en scène Pékinois  sur un spectacle. Cela n’a pas abouti car il après une semaine de travail avec ses comédiens il s’est rendu compte que le masque n’était  pas un accessoire mais un élément constitutif de l'écriture théâtrale.  Faute de pouvoir réécrire le texte et toute sa conception du spectacle il a renoncé à utiliser mes masques.






J’ai pu donner à Beijing des stages de formation et collaborer avec une école qui crée son enseignement  exclusivement autour de théâtre. 



      












J’ai également eu une très belle expérience dans le Yunnan avec un groupe de chercheurs sur la culture Naxis.  Cette  ethnie a été formée par les guerriers venus de Mongolie avec les armées de Gengis Khan. Restée isolée dans les contreforts de l’Himalaya elle a créé un syncrétisme entre les religions primitives du Tibet et des ethnies locales. Société matriarcale pendant des siècles, très peu sinisée elle a conservé jusqu’à la révolution de 1949 une grande partie de ses croyances et de ses coutumes. Aujourd’hui elle ne représente plus que 250 000 personnes, la plupart dans son ancienne capitale Lijiang.
Grace à un système d’écriture hiéroglyphique encore pratiquée par les prêtres Dongbas,  aujourd'hui les scientifiques traduisent en mandarin  ces légendes et coutumes riches  d’un passé préservé. Hélas leur visibilité est restreinte aussi ces chercheurs ont vite compris l'intérêt de mise en espace dramatique de leurs héritage.
J'ai créé des masques en m'inspirant de leur iconographie car je n'avais pas assez de temps pour les former à la fabrication de masque de qualité suffisante.Et nous avons mis en scène une de leur légende fondatrice.


Nous avons joué dans un parc  à Lijiang en juin 2012. Il aurait fallu allé plus loin ils étaient demandeur mais je me suis heurté au fait politique. Les minorités sont certes reconnues par les autorités et même appréciées pour leur "valeur touristiques" mais il ne faut pas trop en demandé...